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Évaluation

12 000 festivaliers ont afflué samedi 5 janvier 2013 pour la principale soirée du FestiZad, organisé par les occupants du supposé futur aéroport, à Notre-Dame-des-Landes. Spectacle lunaire, que ces longues colonnes de marcheurs qui cheminent sur les routes départementales, bordées de caravanes bricolées, camions customisés, de tous terrains modèle armée, d'où sortent des effluves technoïdes qui ne troublent pas la quiétude du bocage inviolé: l'ambiance est « roots » (racines). Notre-Dame-des-Landes semble rejoindre les lieux les plus mythiques de la « Bretagne mystérieuse », mais non sous l'effet d'un pur enchantement : le formidable scénographe qui a organisé ce spectacle en pleine campagne brumeuse, c'est une cause politique. Et l'endroit vers lequel tous convergent est le site du FestiZad, organisé par les occupants illégaux du futur site de l'aéroport à Notre-Dame-des-Landes. « Cela me rappelle un peu l'ambiance des concert des Ramoneurs de menhirs », commente cette jeune connaisseuse des festivals du centre Bretagne. Et il est vrai qu'à quelques minutes de Nantes, on change de planète. Ici, c'est la boue contre le béton. Les zones humides contre les zones avides. « La musique, ce n'est pas notre type d'action, indique Bernard, un vieux militant, mais les jeunes savent très bien s'y prendre. Je suis très heureux de voir tous ces jeunes essayer de construire quelque chose, pour ménager l'environnement et maintenir les terres agricoles. » La sono crachote. Un organisateur prend le micro : « Un petit service, si vous pouviez aller chercher des branches mortes et de la paille pour raffermir le sol, ça serait sympa. » On déroule les roundballers dans la gadoue, alors qu'une rappeuse à guitare monte sur scène : « Je m'appelle Keny Arcana ». Les spectateurs s'interrogent: « C'est la Keny Arkana? », quand les autres, moins au fait, demandent: « C'est qui Keny Arcana? » C'est la première à avoir proposé de venir chanter, et qui est à l'origine de ce festival improvisé. La scène de fortune est bricolée avec des fascines de branchage très « gothiques ». Le public afflue, entre poussette et bière, bagarre de chien et dégustation de chili con carne géant: « on en a fait deux fois soixante litres, il faut bien que ça mange. » Plus loin dans le petit bois, s'étire une longue file: « Ils font des tartiflettes, mais la file d'attente est énorme », indique un grand affamé, rejoint par un autre qui frissonne: « Je suis venu parce qu'il y avait du feu, mais si en plus il y a à manger, génial. » Mais la nuit ne fait que commencer, les pieds dans la boue, la tête dans les étoiles: Peace, Merlin l'enchanteur peut faire son entrée.