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Pour Monique Barbut, secrétaire exécutive de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification, le climat est la première cause des migrations de populations. http://ow.ly/XTbb305YCw2 Qu’est-ce que la convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification et la détérioration des terres agricoles ? C’est l’une des 3 conventions de Rio au même titre que la convention sur les changements climatiques et la convention de lutte contre la perte de la biodiversité. C’est une convention que les Africains ont exigé au moment de la Conférence de Rio en refusant de signer les deux autres s’il n’y avait pas celle-là. Elle a été signée à contre cœur par la plupart des grands pays, c’était le prix à payer pour avoir les Africains dans les deux autres. On parle beaucoup de la COP21 mais très peu de ces conventions qui sont très importantes. Vous avez un lien direct avec la crise des réfugiés, quel est-il ? Les 400 000 réfugiés dont on parle actuellement arrivent tous de pays arides, c'est-à-dire qui souffrent de sécheresse. Elles deviennent de plus en plus fortes et les températures moyennes augmentent. Ce sont des réfugiés politiques ou climatiques ? Ils sont les deux. Tous les experts s’accordent à dire que la crise politique syrienne actuelle est en partie due aux 4 années de sécheresse qui ont jeté 1 million de paysans dans la rue. Cela ajouté au million de réfugiés irakiens, vous avez soudainement, en 2010, 2 millions de personnes à qui aucune source d’espoir n’était plus permise. Cela créé des révolutions. Autre exemple, la plupart des réfugiés du Nigeria viennent du nord du pays, qui dans les années 60, nourrissait tout le Nigeria mais aussi pratiquement toute l’Afrique. A la fin des années 60, les découvertes de pétrole dans le sud du pays ont entrainé l’arrêt des politiques agricoles du gouvernement. Ils considéraient que la richesse qui proviendrait du pétrole permettrait de nourrir le Nigeria. 90 millions de Nigérians ont été laissés à l’abandon, ils vivent aujourd’hui avec moins d’un dollar par jour. En 2012, l’immigration totale sur l’Europe c’était 1,2 million de personnes, sur le lac Tchad la même année, c’est 7,5 millions de Nigérians qui ont migré. La vision à moyen terme est assez inquiétante. Que va-t-il se passer ? Quelles sont les solutions ? Si rien n’est fait, selon l’étude que nous avons faite avec l’Office international des migrations, d’ici 2025, ce seront 60 millions de personnes qui vont migrer de l’Afrique subsaharienne vers l’Europe et l’Afrique du nord. Sur cette planète, il y a 2 milliards d’hectares de terre dégradés. Si on restaurait 500 millions d’hectares de ces terres, on assurerait la sécurité alimentaire à l’horizon 2050 pour les 10 milliards que nous seront. Et on séquestrerait un tiers des gaz à effet de serre chaque année. C’est un enjeu énorme. On considère que l’on peut restaurer 1 hectare de terre dégradé en moyenne de 200 dollars/hectare. Ca coûterait donc moins cher de s’intéresser à la question de la dégradation des terres qu’à la transition énergétique ? Les deux doivent se faire mais en oublier un est une erreur magistrale car le coût économique et politique que nous devrons payer est sans commune mesure. Un réfugié coûte 35 euros par jour sachant qu’il reste en moyenne dans un camp de réfugiés en moyenne 2 ans. Ce que nous disons c’est que non seulement on peut séquestrer massivement du carbone, ce sont des politiques fortes d’adaptation au changement climatique et c’est une solution bien moins onéreuse aux guerres que nous allons bientôt vivre si rien n’est fait dans ces pays. On ne peut pas laisser les 2 milliards d’Africains qu’il y aura bientôt sans manger. Est-ce qu’il existe un statut de réfugié climatique ? Non et c’est une question qui est à peine discutée. Les premiers à l’avoir demandé ce sont les gens qui vivent sur les petites iles, qui craignent pour leur survie. Cela implique tellement de changements politiques que la plupart des grands pays ont toujours refusé de discuter d’un statut officiel de réfugié climatique.